Interview de Cyriaque Dailland : Analyste-gérant pays émergents et devises chez Conviction Asset Management

Cyriaque Dailland

Analyste-gérant pays émergents et devises chez Conviction Asset Management

La baisse du yuan n'est pas une réponse apportée au ralentissement économique de la Chine

Publié le 26 Février 2014

Quelle lecture faites-vous de la baisse du yuan par rapport au dollar ces derniers jours ?
Trois indicateurs peuvent être suivis s’agissant de la parité yuan dollar: le taux de change de référence de la Banque centrale, le taux de change sur le marché de Shanghai, le taux de change sur le marché de Hong Kong.
L’indicateur clé est le taux de référence de la Banque centrale. Cet indicateur a relativement peu baissé. Le mouvement de l’institution monétaire s’explique principalement par une volonté d’estomper les flux entrants spéculatifs sur la devise.

Que voulez-vous dire ?
La Banque centrale a voulu faire comprendre aux investisseurs qu’il n’était pas question que le yuan suive une appréciation linéaire à hauteur de 0,05% tous les jours. La logique poursuivie est plus une logique de marché qu’une logique économique.

L’intervention a permis de nettoyer une partie sur le marché...

Face à la hausse de la volatilité, les investisseurs les plus courtermistes se sont retirés.

Ne pensez-vous pas que la baisse du taux de change est un élément de réponse apporté au ralentissement économique observé dans le pays ?
Les autorités chinoises n’ont plus la volonté d’accumuler massivement des réserves de change car elles souhaitent rééquilibrer leur économie. Elles sont désireuses d’amoindrir le coût des matières premières importées.
La réalisation de ces deux souhaits supposent un renforcement de la devise plutôt qu’une dépréciation.

Vous ne faites donc pas le lien entre la dépréciation de la devise et le recul de l’indice PMI du secteur manufacturier chinois ces deux derniers mois…

Je ne le pense pas. Si les autorités avaient voulu procéder à une dépréciation de la devise pour des considérations économiques, elles l’auraient fait progressivement et non par un mouvement brusque. Nous sommes ici davantage face à un avertissement pour les intervenants de marché.
Malgré le recul des indices PMI, il ne me semble pas que les dirigeants chinois aient de fortes craintes sur la croissance en tant que tel. Ce d’autant plus que la balance commerciale de la Chine est sur ces plus haut en janvier.

Selon vous, plutôt que de remettre en question la tendance de l’appréciation en elle-même, c’est plutôt le rythme d’appréciation qui pourrait être reconsidéré ?
Au pire, l’institution monétaire pourrait laisser la devise se stabiliser quelques mois.

A ce jour, les intervenants de marché ont une marge de manœuvre de plus ou moins 1% par rapport au taux de référence de la Banque centrale. Ces derniers peuvent fixer un cours uniquement dans la fourchette autorisée. Il est question de doubler le corridor. Qu’en pensez-vous ?

Cette extension pourrait se faire en deux étapes (1,5% puis 2%) et s’inscrit dans une optique d’internationalisation de la devise.

Quel potentiel d’appréciation additionnel voyez-vous encore sur la devise ?

En parité de pouvoir d’achat, le yuan qui était fortement sous valorisé l’est un peu moins. Nous pourrions encore avoir une appréciation du cours du yuan de 10%, à hauteur de 2% à 4% par an.

Propos recueillis par Imen Hazgui