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Comprendre la crise des «subprimes»

Pour comprendre la mécanique de la crise des «subprimes», il faut repartir de la terminologie américaine qui distingue 3 types d’emprunteurs en fonction de leur solvabilité :

- les primes : emprunteurs les plus solvables

- les Alt-A : catégorie intermédiaire de personnes a priori solvables mais qui ont des difficultés à justifier de revenus réguliers (artisans par exemple)

- les subprimes : emprunteurs les moins solvables

Ces niveaux de solvabilité sont essentiellement déterminés sur la base d’une grille d’évaluation (ou «scoring»). Le «score» le plus répandu aux Etats-Unis est le score FICO, acronyme de la principale société de scoring américaine : la «Fair Isaac Corporation». Un score FICO est compris entre 300 (note la plus basse) et 850 (note la plus élevée), 60% des scores étant compris entre 650 et 799.

Un emprunteur «subprime» a habituellement un score FICO inférieur à 620. Il a de plus un historique de crédit mouvementé, avec des retards de paiement sur ses précédents crédits. A fin 2007, on estimait que les prêts «subprime» représentaient 17 à 18% de l’encours de prêts aux Etats-Unis, soit un montant de 1 200 milliards de dollars environ.

 


Pourquoi les emprunteurs subprime sont-ils aujourd’hui en difficulté ?

Au début des années 2000, l’octroi de prêts subprime a été encouragé par la très forte baisse des taux directeurs aux Etats-Unis et la hausse régulière des prix de l’immobilier. Ces deux éléments ont permis de solvabiliser des ménages aux revenus modestes et ont permis aux banques de capter une nouvelle clientèle, les emprunteurs «subprimes». Par ailleurs, afin d’attirer de plus en plus de clients, les prêts subprimes ont fait l’objet d’une structuration particulière.

Un prêt subprime est en effet souvent composé :

- d’un prêt à taux fixe attractif sur 2 ou 3 ans

- qui se transforme en prêt à taux variable à un taux beaucoup moins favorable ensuite. Cette évolution peut entraîner une forte augmentation des charges financières pour les emprunteurs. Ce passage d’un taux fixe attractif à un taux variable (taux de marché) beaucoup moins attractif s’appelle le «reset».

Une telle structuration de prêt fonctionne très bien tant que les prix de l’immobilier sont orientés à la hausse et que les taux restent bas. A l’issue des 2 ou 3 ans de taux promotionnel, l’emprunteur subprime a en effet la possibilité de profiter des taux de marché bas et, éventuellement, de la concurrence entre banques pour refinancer son prêt. Il peut également choisir de revendre son bien dont le prix a augmenté et rembourser ainsi son prêt par anticipation tout en bénéficiant d’une plus-value à la revente.

En revanche, en période de hausse des taux et de baisse des prix de l’immobilier, la situation peut devenir très délicate pour les emprunteurs subprimes. Les charges financières liées au prêt augmentent très fortement du fait du «reset». La baisse des prix de l’immobilier fait que l’emprunteur n’a plus la possibilité de revendre son bien à un prix intéressant.

Il ne trouve par ailleurs plus de banques pour refinancer son prêt. Déjà fragiles financièrement, les emprunteurs subprimes se retrouvent alors dans l’impossibilité de rembourser leur prêt et voient leur banque saisir leur bien immobilier. C’est le mécanisme qui est à l’œuvre aujourd’hui.

La contagion de la crise : le mécanisme de la titrisation

A priori, compte tenu du montant des encours, la crise liée à l’augmentation du taux de défaut de paiement sur les crédits subprime aurait dû avoir un impact limité sur la finance internationale en général et les banques américaines en particulier.

La crise telle que nous la connaissons aujourd’hui vient du fait que les banques n’ont pas gardé ces créances subprime dans leur bilan mais qu’elles les ont titrisées (Voir Focus sur le mécanisme de la titrisation) et vendues sous cette forme à de multiples investisseurs.

La titrisation a aujourd’hui 2 conséquences principales :
- personne ne sait précisément quel établissement est exposé au subprime, ni pour quel montant
- les banques ont cessé de se faire confiance entre-elles.

Il s’agit donc aujourd’hui d’une crise de confiance. C’est cette crise de confiance qui paralyse les marchés, touchant par là tous les secteurs de la titrisation -soit plus de 5 000 milliards de dollars d’actifs financiers- ainsi que l’ensemble du marché interbancaire.

Focus sur le mécanisme de la titrisation

Une banque A vend des créances à une société B, qui n’a d’autre activité que d’acheter ces créances. La société B finance l’achat de ces créances en émettant des titres (ce pourquoi on parle de «titrisation»), dont le remboursement est gagé sur le remboursement des créances que la société B avait acheté à la banque A.

Il y a donc un transfert du risque sur ces créances, de la banque vers les investisseurs. Parmi les investisseurs, on retrouve un nombre important de banques qui ont titrisé leurs propres créances d’un côté et acheté des titrisations émises par d’autres banques de l’autre.

Depuis le début de la crise (été 2007), ce marché de la titrisation est quasiment fermé, de sorte que les investisseurs se retrouvent avec des titres émis par les entités de titrisation qui ne sont plus liquides et dont la valeur a fortement diminué. Par ailleurs, la composition exacte de ces multiples véhicules de titrisation (lesquels contiennent du subprime ? Dans quelle proportion ?) est devenue difficile à connaître, ce qui explique la crise de confiance.

Un autre point a également renforcé cette crise de confiance : c’est le fait d’avoir retrouvé ce type de produits dans les bilans des banques américaines, des banques européennes ou dans les fonds monétaires dynamiques commercialisés par de grands gestionnaires d’actifs.