Degroof Petercam AM fait le point sur sa stratégie d'actions hauts dividendes
(Easybourse.com) Mardi 12 février, la société Degroof Petercam Asset Management (DPAM) organisait dans ses locaux une rencontre avec ses gérants de portefeuille sur le thème des actions hauts dividendes. A cette occasion, Benoit Ducatillon est revenu sur les grandes lignes de la stratégie d'investissement déclinée sur trois zones : Euro, Europe et Monde. EasyBourse vous propose dans cet article les principaux enseignements tirés de cet événement.
Pourquoi fait-il sens de se positionner aujourd’hui sur le style dividende ?
Trois raisons principales peuvent être évoquées d’un point de vue global. Lorsque l’on s’intéresse au rendement total des indices actions, on s’aperçoit que sur le long terme, le dividende représente environ 60% - 70% du rendement total selon les zones géographiques
Par ailleurs, nous vivons dans un contexte de taux relativement bas qui a vocation à le rester. Aussi, l’ecart entre les rendements de dividende proposés sur la plupart des marchés actions et les rendements offerts par les obligations souveraines ou les obligations corporate de bonne qualité est particulièrement intéressant.
Enfin, la polarisation extrême des performances et des valorisations au sein du marché européen en particulier fait que l’univers de titres hauts dividendes est valorisé de manière particulièrement attractive actuellement.
D’autres considérations spécifiques sont évocables suivant les zones géographiques…
Effectivement. En Europe les dividendes sont bien moins volatiles que les bénéfices. Depuis 1970, la baisse moyenne des dividendes est d’environ 11% en période de récession tandis que la baisse moyenne des bénéfices est d’environ 35% sur la même période. En outre, le « pay-out ratio », autrement dit la part des bénéfices payée sous forme de dividendes aux actionnaires, est revenue quasiment en ligne avec la moyenne historique, autour de 60%, alors qu’il n’y a pas eu de recours massif à l’endettement des entreprises européennes et que l’on a constaté une amélioration de la génération de cash par un accroissement des marges et des ventes.
Aux Etats-Unis, bien que la Bourse américaine ait beaucoup monté, il est intéressant de relever que le style dividende a clairement sous-performé ces dernières années. Aujourd’hui, les actions à dividende américaines traitent avec une décote historiquement élevée par rapport au marché américain. Leur valorisation est en cela attractive.
L’intérêt des actions à dividende américaines demeure-t-il en dépit de la hausse des taux américains ?
Les fonds DPAM Dividend Equity, de par leur stricte discipline en matière de valorisation et leur approche fondamentale en matière de sélection de valeurs, proposent un dividend yield supérieur à celui du marché pour chaque zone géographique. Aussi, le dividend yield de la poche américaine du portefeuille de DPAM Equity World Dividend se situe actuellement à 3% contre 2% pour le marché américain pris dans son ensemble.
Par ailleurs le niveau absolu des taux reste particulièrement bas à travers le monde, les attentes d’inflation sont modestes et l’histoire nous montre que les bourses peuvent s’accommoder d’une éventuelle hausse des taux, a fortiori lorsque les taux sont relevés pour de bonnes raisons (normalisation suite à une reprise macro-économique)
Une autre région qui constitue une conviction est le Japon ?
En préambule , le processus d’investissement des fonds DPAM Equity Dividend est basé sur une sélection de titres à partir d'une analyse fondamentale des sociétés. Dès lors, les poids consacrés aux différents régions ou secteurs sont toujours lea résultante de cette sélection et non la conséquence d’une vue sectorielle ou macro.
Ceci dit, il est vrai que le poids en valeurs japonaises a augmenté récemment, vu les bilans particulièrement solides et des business modèles résilients de nombreuses sociétés nippones, permettant d’envisager à terme un relèvement des dividendes, à l’image de notre position sur DISCO, une société industrielle vendant notamment des machines permettant des découpes à haute précision.
Une exposition non négligeable aux valeurs britanniques peut être observée, pouvant aller jusqu’à 30% dans certains fonds ?
Lorsque l’on met en contraste le risque lié au Brexit et la valorisation des actions britanniques détenues en portefeuille, le scénario catastrophe parait être déjà largement intégré dans les cours.
Une vue constructive peut être avancée sur des promoteurs de logements britanniques tels que Barratt Developments, qui jouissent d’une perspective d’amélioration de marge en outre du déficit important de logements neufs dans le pays. Dès lors, le gouvernement fournit des prêts et des garanties aux citoyens britanniques qui veulent acheter leur premier logement. Eu égard à la santé financière de ces sociétés (net cash au bilan, dividend yield proche de deux chiffres) et aux perspectives solides de génération de cash au vu des conditions de marché, nous estimons toujours que les valorisations sont excessivement pénalisées par le risque d’un "hard Brexit".
GlaxoSmithKline est une autre société britannique sur laquelle une position a été établie. La société pharmaceutique relève actuellement le défi de rajeunir son pipeline tout en préservant sa capacité à délivrer un dividende attractif et à renforcer son pôle médicaments sans ordonnance, notamment à travers son récent deal de fusion avec les activités OTC de Pfizer.
Qu’en est-il du process d’investissement ?
Ce process se résume en plusieurs étapes. Une première étape est celle d’un screening quantitatif. Pour chaque zone géographique, nous isolons les valeurs dont le rendement de dividende est supérieur à celui de l’indice.
Une autre étape de notre process est l’analyse fondamentale détaillée, qui constitue véritablement l’ADN de DPAM. Cette étape est collégiale et s’appuie sur une équipe composée de dix analystes spécialisés sur base sectorielle et trois gérants spécialisés dans l’immobilier.
Des échanges se font également avec l’équipe fixed income sur certains dossiers.
La sélection n’est pas basée sur le dividende passé, ni sur le dividende actuel…
En effet la sélection de valeurs s’effectue sur la capacité qu’aura la société de proposer un dividende durablement au-dessus de la moyenne du marché, indépendamment de la politique passée de la société en la matière.
Ceci suggère une analyse approfondie des fondamentaux de la société : son business model, sa santé financière et ses priorités en matière d’allocation du capital. Souvent, nous préférerons un dividende légèrement moins élevé mais soutenu et en croissance qu’un dividende parmi les plus élevés à court terme mais qui ne va pas croître dans le temps et dont le risque de coupe est élevé.
Nous ne nous permettons aucune flexibilité en ce qui concerne le critère du rendement de dividende. Toutes les sociétés du portefeuille ont un rendement de dividende prospectif égal ou supérieur à celui de l’indice. Par conséquent, les fonds DPAM Equity Dividend sont peu investis dans des secteurs tels que les « biens de consommation de base ». Souvent, il s’agit de sociétés fortement endettées, dont la croissance est modeste et les valorisations élevées. Notre seule exposition dans le secteur de la consommation est celle sur les sociétés productrices de saumon (Mowi, Grieg Seafood notamment), dont les valorisations sont attractives en dépit d’une bonne dynamique de croissance de la demande, et d'une fait d'une offre limitée (conditions climatiques et géographiques difficiles) ainsi que d’une forte génération de cash favorisant le retour pour l’actionnaire.
Qu’est ce qui peut vous amener à retirer un titre du portefeuille ?
Il existe trois cas pour lesquels nous vendons notre exposition dans une société.
- lorsque le rendement de dividende devient inférieur à celui de l’indice à la suite d’une bonne performance du titre et qu’il n’y a pas la conviction d’un upside de ce rendement comparativement au consensus
- lorsque nous avons des craintes sur une coupe du dividende en raison d’une détérioration des fondamentaux d’une entreprise
- lorsque nous constatons un changement de dynamique sectorielle. C’est par exemple le cas du tabac où la transformation du secteur a déconsolidé le marché et devrait réduire les marges des cigarettiers à la suite de nouvelles réglementations sur les produits nouvelle génération (e-cigarettes notamment).
Quel est l’horizon d’investissement sur une telle stratégie d’investissement ?
L’horizon d’investissement va de trois à cinq ans.
Qu’en est-il de votre turnover sur cette stratégie d’investissement ?
Le turnover est relativement faible au vu de note processus, environ 20% en 2018.
Une discipline a-t-elle été définie dans le cadre du process ? Des limites ont-elles été fixées notamment pour assurer une certaine diversification du portefeuille ?
En terme de risque, plusieurs critères de diversification ont été bien définis dans notre processus d’investissement. Ainsi, nous nous limitons à un poids de 5% maximum par titre tandis que nous restreignons les contraintes sous-sectorielles (maximum 10% de surpondération) et géographiques (maximum 15% de surpondération par pays) .
En théorie, les fonds peuvent avoir jusqu’à 10% de cash mais, en ligne avec notre philosophie, nous préférons être totalement investis. Le niveau de cash des 3 fonds fluctue entre 0% et 5%.
En ce qui concerne le risque de liquidité, nous procédons en deux temps. Tout d’abord, nous avons inclus dans le screening un filtre de liquidité qui nous permet d’éviter les titres peu liquides. Nous ne descendons pas en dessous d’un certain seuil de volume moyen traité, situé à 1,5 million d’euros. Pour rappel , 95% du portefeuille doit pouvoir être liquidé dans les 5 jours.
Aucune couverture n’est mise en place contre le risque devise.
Qu’en est-il des biais ?
Même si nous sommes ouverts sur tous les secteurs en raison de notre approche dynamique sur le dividende, il y a un biais naturel vers des secteurs dont les rendements des dividendes sont les plus élevés (Immobilier, Telecoms, Financières).
En conséquence de notre processus d’investissement, les fonds DPAM Equity Dividend recherchent des sociétés à valorisation attractive mais dont le business model est de qualité et si possible en croissance.
Par conséquent, selon les conditions de marché et les valorisations, le style des fonds DPAM Equity Dividend peut évoluer très légèrement. En 2014, ces fonds étaient un peu plus exposés sur des titres perçus comme de haute qualité alors que depuis quelques années, cette expositions a évolué vers des titres plus « value ».
Enfin, en ligne avec l’ADN de DPAM basé sur la sélection de valeur, les produits DPAM Equity Dividend ont une exposition plus prononcée vers les small et midcaps. La capitalisation moyenne du fonds DPAM Europe Dividend est de moitié inférieure à celle du MSCI Europe.
Pour l’heure, trois fonds leaders sont gérés suivant cette stratégie d’investissement…
Le plus ancien est DPAM Invest Europe Dividend. Lancé en 2002, le rendement du dividende du portefeuille est actuellement de 6,3%, contre 4,2% pour l’indice MSCI Europe.
Le fonds DPAM Invest EMU Dividend, repris sous gestion en juin 2018, est plus concentré, car il n’est pas investi dans les pays Nordiques (Suède, Norvège) , ni au de Royaume-Uni. Le rendement du dividende du portefeuille est actuellement de 6,1%, contre 3,9% pour l’indice MSCI EMU.
Enfin, le fonds DPAM Invest World Dividend est le plus diversifié. Ce dernier permet d’aller sur des zones géographiques différentes comme les Etats-Unis et le Japon. Il est exposé à des valeurs technologiques comme Accenture, à des valeurs de biens de consommation de base (Mowi, Grieg Seafood) et des valeurs pharmaceutiques (Merck, Pfizer, Abbott, GSK) en raison d’un critère de dividende plus faible que les marchés européens.
Ces trois fonds ont tous une "active share" supérieure à 85%.
La participation à la hausse des trois fonds est de 90%. La participation à la baisse est de 80%. L’amortissement est d’environ 20%.
De quelle manière cette année 2019 est-elle appréhendée ?
Dans un contexte de ralentissement économique global et de tensions géopolitiques, nous pensons que notre processus d’investissement unique basé sur une analyse fondamentale rigoureuse et une discipline sur la valorisation offrant un dividende en croissance et soutenu permettra de créer de la valeur sur un horizon de 3 à 5 ans.
Les fonds DPAM Equity Dividend ont tendance à montrer des caractéristiques défensives dans un contexte de baisse des marchés boursiers en raison de la forte visibilité sur les cash-flow et sur l’allocation du capital des sociétés composant le portefeuille.
Imen Hazgui
Publié le 27 Février 2019